Emploi : la recette du miracle Québec.
Taux de chômage à 4,1 % et l'une des croissances les plus fortes du pays; contrairement à d'autres régions, Québec connait une situation économique exceptionnelle. La capitale nationale peut-elle inspirer les politiciens en campagne?
Un texte de Sophie Langlois
Les subventions aux secteurs de pointe, comme les technologies de l'information et les jeux vidéo, expliquent en partie ce succès, selon Dominique Brown, fondateur et ancien président de Beenox, rachetée depuis par l'américaine Actvision.
L'entrepreneur de 34 ans a lancé Beenox en 2000 dans un local miteux du quartier, qui commençait à renaitre.
L'ancien maire du Québec, Jean-Paul L'Allier, avait convaincu l'Université Laval et l'Université du Québec de déménager des facultés autour du parc Saint-Roch, qu'il avait fait construire pour revitaliser le quartier. Il a ensuite convaincu le gouvernement du Québec, péquiste à l'époque, de créer des incitatifs pour attirer des entreprises, comme des loyers et des salaires subventionnés.
Aujourd'hui, le secteur des jeux vidéo embauche près de 1000 personnes à Québec, presque toutes dans Saint-Roch. Les loyers ne sont plus subventionnés, mais les salaires le sont encore, jusqu'à 37 %.
De 2002 à 2012, la croissance dans la région de Québec a explosé :
- Produit intérieur brut : + 24 %, 1er au Québec
- Valeur des permis commerciaux de construction : + 115 %
- Ventes au détail : + 49 %
- Immigration internationale : + 76 %
Des jeux vidéo au chocolat
Dominique Brown, lui, a depuis quitté le quartier et le monde des jeux vidéo pour celui du chocolat. « Je veux créer ma propre multinationale du chocolat avec un siège social à Québec », lance-t-il confiant.
Et c'est bien parti. Depuis qu'il a acheté « Chocolats favoris » en 2012, il a ouvert une quatrième boutique et en a trois autres en travaux. Il planche aussi sur une fondue au chocolat en boite de conserve en vente en épicerie.
Embauchant de 150 à 250 personnes selon la saison, M. Brown espère gonfler son chiffre d'affaires à 100 millions d'ici 2020.
Une renaissance
Pourtant, la situation n'a toujours été aussi bonne dans la région. Dans les années 1990, Québec subissait de plein fouet les effets des coupes massives dans la fonction publique et du déclin du secteur manufacturier. Les immeubles de bureaux se vidaient, les nouvelles constructions étaient rares.
Les politiques de diversification économique lancées à l'époque ont porté fruit. Des centaines de PME contribuent maintenant à maintenir le taux de chômage au bas de l'échelle, avec les secteurs des assurances et des finances, qui mène le bal de la création d'emploi dans la région.
Et ce, même pendant la crise. « Alors qu'en pleine récession, on voyait des licenciements à gauche et à droite, il s'est créé plus de 2000 emplois dans les cinq dernières années, une hausse de 20 % », explique Clément Gignac, premier vice-président d'Industrielle Alliance et ex-ministre libéral.
Pour l'économiste, trois facteurs expliquent ce succès :
- Une importante concentration de main-d’œuvre qualifiée et compétente, grâce à l'Université Laval, qui est très proche des besoins du secteur privé.
- Le dynamisme du secteur privé qui investit et attire des capitaux étrangers
- Une grande concertation de la communauté d'affaire avec une direction politique très forte qui fait en sorte que la région parle d'une seule voix face à Ottawa et à Québec
Miser sur l'hyperspécialisation
Un exemple puissant de cette relation fructueuse entre l'Université Laval et le secteur privé est le Parc technologique de Québec, où on retrouve une centaine d'entreprises qui œuvrent dans des niches comme l'optique photonique et la biopharmaceutique. Des sociétés qui ont presque toutes grandi avec l'aide de l'État.
La majorité des travailleurs du parc technologique sont dans la trentaine, la moitié a un diplôme universitaire et 10 % sont nés à l'étranger, selon la directrice générale du Parc technologique, Natalie Quirion.
La région de la capitale compte maintenant 152 filiales de sociétés étrangères et elle reçoit 11,4 % des capitaux de risque investi au Québec, ce qui est plus que sa part démographique de 9,6 %.
« Il y a eu des décisions historiques très audacieuses prises il y a 25 ans, dit madame Quirion. Parler d'un parc technologique et d'économie du savoir, c'était particulièrement audacieux ».
De son côté, le maire de Québec n'a pas exprimé de demandes pour cette campagne. Quand les journalistes lui ont posé la question mardi, à la veille du déclenchement électoral, Régis Labeaume s'est dit « un peu gêné » d'en demander plus, après l'annonce, la semaine dernière, que 100 millions seront investis dans un anneau de glace à Québec. (…).
Source : Radio-Canada
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